WHAT Un statut juridique des biens communs?Réflexion à partir du rapport propriété, Etat, société civile , Seminar
WHEN May 19 2015, 10:00 -18:30
WHERE Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord, Salle 413 (sud), 20, avenue George Sand, La Plaine Saint-Denis (Metro station « Front Populaire » exit 3 (terminus ligne 12))
Séminaire franco-Italien organisé par
Fabienne Orsi (IRD, SESSTIM, Université Aix-Marseille et CEPN, Université Paris 13) et Frédéric Sultan (Vecam)
Il s’agit du 1er séminaire d’un projet de recherche exploratoire financé par la MSH Paris Nord et coordonné par Fabienne Orsi (IRD), Caroline Guibet Lafaye (CNRS), Frédéric Sultan (Vecam), Sarah Vanuxem (Université de Nice Sophia Antipolis). Avec le soutien du Centre d’Economie de Paris Nord).
Ce séminaire franco-italien s’inscrit dans le cadre d’un projet de recherche exploratoire et pluridisciplinaire en droit, en philosophie et en économie politique dont l’objectif est de conduire au renforcement d’un réseau d’équipes pour l’élaboration d’un projet de recherche international de plus grande ampleur. Ce projet s’inscrit dans la poursuite de nos travaux respectifs portant sur la manière de penser autrement la propriété ainsi que sur les formes d’actions collectives nouvelles associées à la gouvernance des communsi.
L’objectif de ce premier séminaire est d’explorer la manière dont une reconnaissance d’un statut juridique pour les biens communs permettrait à la fois d’élargir l’espace de réflexion sur des conceptions renouvelées de la propriété et d’offrir un cadre fécond pour penser la recomposition des rapports entre propriété, Etat et société civile.
En Italie, la création d’un statut juridique pour les biens communs a fait l'objet de nombreuses initiatives, tant conceptuelles qu’empiriques. Les travaux de la commission Rodotà tout particulièrement ont permis d'élaborer une doctrine en vue de la reconnaissance d'une catégorie juridique pour les biens communs, doctrine dont l’élaboration s’est construite comme alternative aux processus de privatisation grandissant des biens et services publics et à partir d’une profonde réflexion sur la propriété publique, l’Etat, les droits fondamentaux et la fonction sociale des biens publics. Ces travaux se poursuivent en dehors de la commission Rodotà, avec, en particulier ceux d’Alberto Lucarelli, professeur de droit public à l’Université de Naples qui dans son essai « Biens communs : Une contribution pour une théorie juridique »ii approfondit de manière critique la notion de propriété d’Etat fondée sur le modèle du dominium de la propriété publique ainsi que sur la manière dont celle-ci affecte les diverses dimensions de la démocratie et des formes d’Etat. La matinée du 19 mai sera consacrée à la présentation et à la discussion du texte d’Alberto Lucarelli. Le débat sera à dominante juridique avec une introduction au débat par Séverine Dusollier et la participation à la discussion de plusieurs juristes invités à commenter le texte.
Si la réflexion théorique et conceptuelle, de même que la nécessité d’élaborer de nouvelles lois revêtent une importance capitale pour l’avenir du mouvement des communs, il reste que son avancée est aussi largement conditionnée à la présence ou non de forces sociales et de nouvelles formes d’actions citoyennes. L’originalité italienne tient d’ailleurs à cette alliance entre académiques et acteurs des mouvements sociaux pour les biens communs. C’est pourquoi ce séminaire mettra aussi l’accent sur la nature des initiatives militantes portant sur des ressources aussi différentes que l'eau, le foncier, la culture. L’après-midi débutera avec une intervention de Daniela Festa qui proposera un tour d’horizon sur le mouvement des communs en Italie.
Nous ferons une part importante à la question de la gestion de l’eau potable et de l’assainissement qui constitue le combat historique pour la reconnaissance des biens communs et dont on peut d’ores et déjà, au regard d’initiatives prises au niveau municipal, tirer certains enseignements. Ricardo Petrella, grande figure du combat international pour l’eau bien commun introduira la discussion.
D’autres initiatives italiennes existent qui ne s’inscrivent pas directement dans l’esprit de la commission Rodotà, ni directement dans le « mouvement des communs », mais qui pourtant, de par leur objet et les innovations sociales dont elles sont porteuses, nous paraissent pouvoir utilement alimenter la réflexion. C’est précisément le cas de l’expérience en matière de confiscation des biens des mafias et de leur redistribution à des fins sociales. Le projet Libera Terra, en particulier, qui organise la réutilisation des terres agricoles confisquées par le biais de coopératives sociales nous est apparu comme pouvant apporter un éclairage singulier à notre questionnement. L’intervention de Niccolò Mignemi au sujet de Libera Terraiii constituera donc une contribution importante et originale sur les formes que peut prendre la reconquête des biens communs.
A partir des trois interventions et au regard de la teneur du débat de la matinée, il s’agira, au cours de l’après-midi, de s’interroger sur la spécificité des initiatives italiennes, ainsi que sur les raisons de leurs émergences en Italie. Peut-on envisager de tirer certains enseignements des expériences italiennes pour la France et, au delà, pour l’Union européenne et ce au moment même où se crée un intergroupe sur les biens communs et les services d’intérêt général au sein du Parlement européen?
Le débat sur les biens communs se trouve parfois posé comme alternative située au-delà la propriété, au-delà de l’Etat. Les expériences italiennes ne montrent-elles pas qu’il s’agit plutôt de mener l’analyse en termes de conceptions renouvelées et de la propriété et de l’Etat et de penser différemment leur rapport? Quelle est la place de la société civile dans ces nouveaux espaces en cours de reconfiguration ? Quelle est sa capacité à co-produire et mobiliser des instruments juridiques et des cadres de gestion (ou co-gestion) des ressources au service de l'intérêt général ? L’émergence d’espaces institués d’initiatives populaires et de démocratie participative apparaît souvent comme un des enjeux déterminants. La proposition de création d’une catégorie juridique pour les biens communs est d’ailleurs directement adossée à la création d’un modèle de gouvernance participative associant élus et acteurs de la société civile. Plusieurs expériences au niveau des municipalités ont été mises en place sur ce modèle en matière de gestion de l’eau potable principalement. Quelles enseignements tirés de ces expériences ? Quelles sont la nature et les formes de l'engagement de la société civile ? Comment s’organise le partage du pouvoir ? Comment les acteurs acquièrent-ils leur légitimité ? Et, au-delà, en quoi une gouvernance plus participative est-elle garante d’une meilleure gestion du bien commun, - comme dans le cas de l’eau-, de sa qualité, de son accès socialement plus juste, de la maîtrise de son prix ? Quelles leçons tirer de ces initiatives et quelles comparaisons faire avec les initiatives françaises de remunicipalisation de l’eau ? Que nous enseignent d’autres expériences que celle de la gestion de l’eau ? Dans cette perspective, le projet Libera Terra fondé sur le principe de redistribution à des fins sociales des terres confisquées n’est-il pas porteur d’une autre manière d’aborder la question du statut juridique des biens communs et par là d’une autre manière de concevoir la reconfiguration des rapports entre propriété, Etat et société civile ?
Program
9h30 Accueil des participants
10h-12h30 : « Bien communs : Une contribution pour une théorie juridique »
- Présentation par Alberto Lucarelli (Université de Naples « Federico II »)
- Introduction à la discussion : Séverine Dusollier (Ecole de droit, Sciences Po Paris)
12h30-14h Pause déjeuner
14h – 14h30 Daniela Festa (IMM, EHESS, Paris ; Université de Pérouse, Italie): Une introduction au mouvement des communs en Italie
14h30-15h Ricardo Petrella (Professeur émérite de l'Université Catholique de Louvain ; Président de l’IERPE):Réflexion à partir de la gestion de l’eau bien commun historique
15h-16h discussion
16h-16h30 pause
16h30-17h : Niccolò Mignemi (Ecole française de Rome) : Réflexion à partir de l’expérience Libera Terra
17h-18h30 : discussion et clôture
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