WHAT: Penser l’ordre juridique médiéval et moderne, Call for applications
WHERE: Clermont-Ferrand, École de droit de l’Université d’Auvergne
Deadline 30 April 2015
L’ordre juridique qui se met en place, en France, aux derniers siècles du Moyen Âge a encore tout récemment été l’objet de riches débats: l’auto-développement des coutumes, l’autorité des droits savants et l’interventionnisme du roi de France ont notamment été au coeur de vives controverses historiographiques. La lecture des sources – normatives, doctrinales et littéraires – est à l’origine de querelles interprétatives, auxquelles s’ajoutent des difficultés méthodologiques que rencontrent les historiens du droit.
Dans sa fonction éminemment rétrospective, l’histoire du droit s’efforce de décrire objectivement des institutions révolues ou un droit qui fut positif (les modes de création de ce droit, la production savante qui l’entoure et son application par les communautés professionnelles de juristes). Tandis que l’historien n’a accès qu’à une proportion infime du concret, celui-ci s’efforce de combler ces lacunes, parfois même à l’aide d’une projection des catégories juridiques contemporaines. Ce renversement de la projection historique – qui, naguère, a pu être l’objet d’une instrumentalisation idéologique – est consubstantiel au développement de l’historicisme juridique, en France, sous la Monarchie de juillet. Combattant par exemple l’adoration de la loi qui irradie la doctrine civiliste du XIXe siècle et dénigrant le positivisme froid hérité de la Révolution, certains historiens du droit – comme Giraud, Laferrière, Brissaud, Viollet ou encore Olivier-Martin – en sont venus à vanter le génie créatif et l’auto-développement de la coutume au Moyen Âge, dont ils ont fait un véritable dogme. Dans une perspective radicalement opposée, lorsqu’il s’agit de réhabiliter la législation du roi de France et l’emprise de celui-ci sur le phénomène coutumier, d’autres s’attachent à esquisser les contours d’un ordre juridique hiérarchisé: une telle approche ne révèle-t-elle pas une projection de la théorie contemporaine des sources du droit sur l’époque médiévale ou les stigmates du positivisme légaliste ? Cet anachronisme des concepts – parfois couplé à un anachronisme des faits – ne constitue-t-il pas ainsi l’un des vices rédhibitoires de la discipline ? Cette méthode ne présente-t-elle pourtant pas, à l’inverse, une indéniable vertu heuristique et disciplinaire?
Certains estiment alors que la théorie du droit est anhistorique, quand d’autres critiquent l’emploi par les historiens de plusieurs concepts contemporains, au premier chef la hiérarchie des normes. De fait, la question du recours à des controverses actuelles dans les recherches historiques semble ne pouvoir se faire sans précaution. On peut par exemple se demander dans quelle mesure le débat entre monisme et dualisme de l’ordre juridique contemporain sert à comprendre l’enchâssement des ordres juridiques au Moyen Âge et à l’Époque moderne. Outre de telles projections, c’est le sens donné à certains signifiants médiévaux ou modernes qui peut être relativisé, comme c’est le cas notamment pour les notions de droit positif, de droit commun ou encore de loi. Ces difficultés révèlent aussi à certains égards l’ambivalence de l’histoire du droit, entre science historique et dogmatique juridique.
Ce colloque sera l’occasion de proposer une réflexion épistémologique sur l’un des grands enjeux de l’historiographie juridique contemporaine: peut-on penser l’ordre juridique médiéval et moderne à partir des catégories juridiques contemporaines?
Colloque organisé par
- NICOLAS LAURENT-BONNE, professeur à l’Université d’Auvergne (Centre Michel de L’Hospital, EA 4232)
- XAVIER PRÉVOST, professeur à l’Université de Bordeaux (Centre aquitain d’histoire du droit, EA 503)
COMITÉ SCIENTIFIQUE
- MARIE BASSANO, professeur à l’Université d’Auvergne
- JULIEN BOUDON, professeur à l’Université de Reims Champagne-Ardenne
- NADER HAKIM, professeur à l’Université de Bordeaux
- NICOLAS LAURENT-BONNE, professeur à l’Université d’Auvergne
- XAVIER PRÉVOST, professeur à l’Université de Bordeaux
- FRANCK ROUMY, professeur à l’Université Panthéon-Assas (Paris II)
- ANNE ROUSSELET-PIMONT, professeur à l’École de droit de la Sorbonne (Université Paris I)
- MICHEL TROPER, professeur émérite à l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense
- KATIA WEIDENFELD, professeur à l’École nationale des chartes
MODALITÉS DE L’APPEL À COMMUNICATION
Les projets de communication sont à envoyer avant le 30 avril 2015 à NICOLAS LAURENT-BONNE (nicolas.laurentbonne@me.com) et XAVIER PRÉVOST (xavier.prevost@ens-cachan.org).
Le projet doit comporter:
- l’intitulé de la communication ;
- la présentation de la communication et de ses sources n’excédant pas 2 500 caractères ;
- un court CV.
INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES
Les actes du colloque seront publiés chez LGDJ dans la collection Contextes, Culture du droit.
Ce colloque constitue le premier volet d’un projet plus large, qui donnera lieu à une nouvelle manifestation scientifique début 2017 à Bordeaux. La réflexion sera alors centrée sur les problématiques similaires qui se posent concernant la recherche en histoire du droit privé.
Lieu
École de droit de l’Université d’Auvergne, les 21 et 22 janvier 2016
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