Prof. dr. Dario Mantovani (Pavia) teaches the course Usages juridiques du passé (dans la pensée des juristes romains) at the Collège de France for 2018-2019.
As with all public courses at the Collège de France, his lectures are available for free on videocast or podcast.
Course presentation:
Le digeste de Justinien et le Corpus iuris civilis dont il fait partie, qui seront au centre de l’enseignement de la Chaire « Droit, culture et société de la Rome antique » à partir de cette année au Collège de France, ont également été au centre de l’enseignement des universités européennes à partir du XIe siècle. Les universités elles-mêmes sont nées autour de la lecture du Corpus iuris civilis grâce à son attrait. Le droit romain recueilli dans ces volumes a donc nourri la culture de générations d’étudiants devenus ensuite juges, fonctionnaires ou avocats. Bien entendu avec des inflexions nationales et locales, avec des mouvements de résistance et de réception, le droit romain est toujours resté un point de repère incontournable. Le Corpus iuris civilis est donc en quelque sorte le livre de chevet de l’Europe. Connaître le droit romain nous offre donc la clé pour la connaissance du développement de cette culture juridique, mais pas seulement la culture juridique. Par exemple Guillaume Budé, le promoteur du Collège de France, lorsqu’il décida au XVIe siècle de restaurer la langue latine, se tourna vers les œuvres des juristes romains parce qu’il savait qu’ils se distinguaient par la précision et la beauté de leur langage. Le droit romain, avant d’appartenir à l’Europe, a appartenu à la Rome antique. Et mon enseignement va porter surtout sur le moment ancien du droit romain. Mais qu’est-ce, au fond, que le droit romain ? C’est une formalisation des rapports sociaux. Il s’agit de choix de valeurs et il s’agit d’un raisonnement. Parce que, oui, il y avait des lois, même d’une certaine envergure, comme la Loi des Douze Tables, mais les lois ne parlent pas seules, il faut que les juristes leur prêtent leur voix. Et donc le droit romain, c’est surtout l’ouvrage, l’œuvre des juristes. Donc il s’agit d’un produit intellectuel. Je dirai, une gigantesque rhétorique sans ruse. Le rôle du juriste romain n’était pas le rôle des avocats. Ils étaient des intellectuels qui cherchaient, par le biais du raisonnement, la solution la plus équitable des conflits d’intérêts. C’est ça qui fait l’attrait du droit romain et qui a permis son réemploi dans l’histoire médiévale et moderne de l’Europe. Une question se pose : comment peut-on renouveler un sujet qui a une tradition d’étude si longue ? Mon séminaire va présenter de nouveaux textes de droit romain que mon équipe et moi avons découverts et publiés. Il s’agit de fragments de papyrus témoins d’ouvrages des juristes romains. Mais derrière le renouvellement d’une discipline historique, il y a aussi le renouvellement du questionnement. Est-ce que les œuvres des juristes romains ont continué à être lues et à fonctionner comme la structure de base du droit même après Dioclétien et jusqu’à Justinien. Eh bien ! la réponse des papyrus est affirmative. On continuait à les copier, à les lire. Donc nous parlons d’une structure cachée. La structure cachée, c’est la pensée des juristes romains incorporée dans ce type d’ouvrage qui a continué à fonctionner même dans l’antiquité tardive.
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